- fxtart
À l'ombre d'un rôle : Chap 5 - Les pistes
De retour chez moi, je ne peux que rester sceptique par ce qui vient de me tomber dessus. Comment j’aurai pu le prévoir ? Rien. Il y a des moments où on se dit que le destin joue avec nos nerfs, en mode sadique. Quelle torture pour moi de me replonger dans le passé. Mais, ai-je vraiment le choix ? Ayant accepté l’affaire, c’est trop tard pour faire marche arrière. Je vois donc jouer les « retours vers le futur » bien malgré moi !
D'ailleurs, la B.O. du film qui se diffuse sur ma chaîne hifi m’offre le privilège de me dire que j’ai raison, alors que je n’avais fait qu’appuyer sur play… Comme quoi le hasard n’est parfois qu’un jeu de miroir sur l’instant.
Mais quelle piste suivre ?
J’en vois quatre.
Le premier est le toubib qui a signé sa nouvelle identité chirurgicale. Mais, il avait été payé et avait signé un contrat de confidentialité… Ou était-ce alors un membre de son entourage ? Quelqu’un qui l’assistait lors des opérations multiples et lourdes, nécessaires au changement définitif ?
Le second est le cabinet d’avocat qui avait scellé dans le marbre son identité passée, et sa mort officielle.
Le troisième est un autre cabinet, qui a créé de toute pièce sa nouvelle vie, pour que le faux devienne réalité.
Le dernier candidat est plus… problématique, bien qu’idéal au premier abord ; un membre de la famille, théâtral ou sanguin.
Et, ces quatre pistes devront avoir le même angle d’attaque : la discrétion, pour ne pas ébruiter l’affaire. Mon vieil ami est mort et enterré, et il doit le rester.
C’est pourquoi Laura a refusé de faire appel à la police, contrairement à ses conseillers qui faisaient tout pour qu’elles gagnent les futures élections. Si la police ouvre une enquête, son secret sera éventé, à coup sûr.
Je suis donc de la partie, bien malgré moi.
Tout ce que je sais pour le moment, c’est que l’épitaphe ciblait sa vie passée, pour mieux discréditer son présent politique, l’éliminer au sens figuré, comme au sens propre vu la menace concrète de balle et du cercueil.
Je pense même que l’un est étroitement lié à l’autre.
Je note sur mon calepin un autre candidat potentiel : un membre de son staff qui aurait eu connaissance de son ancienne peau. Mais Laure m’avait assuré que depuis son changement d’identité, elle n’avait rien dit.
Je note de nouveau quelque chose : drogue. Les soirées festives sous opiacées, mon ami s’en délectait souvent. Continuait-il dans ses travers, et aurait-il vendu la mèche à travers quelques lignes de coke sur le coin d’une table ? Le sexe, drogue, paillette, et Rock & Roll n’étaient pas l’apanage de l’artiste non plus. C’était aussi courant dans d’autres secteurs. Seuls les pauvres ne pouvaient s’enorgueillir de faire tout en même temps, par manque de temps et de moyens.
Les moyens, j’en avais. L’enveloppe proposée par Laure allait couvrir mes frais et mes factures pendant de longs mois.
Le temps, par contre… j’allais en manquer. Les votes étaient dans sept jours. Et, la menace, si elle devait être mise à exécution, allait se faire avant le jour d’ouverture des bureaux de vote !
Je m’enfonce dans mon fauteuil, croisant les doigts derrière la nuque, et je ferme les yeux…
Dans le bureau s’entend le riff de Chuck Berry sur Johnny be good, et curieusement ça me rappelle combien le temps passe vite… pour mieux vous rattraper.